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Exposition : Niki de Saint Phalle au Grand Palais

Niki de Saint Phalle. Autodidacte et avant-gardiste, devenue artiste parce que cela est devenu une nécessité pour cette jeune femme de famille trop bourgeoise et puritaine. Probablement la plus audible des raisons. Qui fait d’elle une artiste prophétique, une féministe avant l‘heure, une artiste baroque et explosive. L’exposition propose une scénographie animée où chaque espace étonne, détonne, pour rappeler la « culture visuelle » de Niki de Saint Phalle, qui a construit sa vie artistique à partir de ses rencontres, ses voyages, ses influences auprès d‘expatriés, et surtout à travers le regard de Jean Tinguely. Elle s’est offerte corps et âme à l’art, délaissant mari et enfant, et l’exposition théâtralise cette approche excessive et jusqu’au-boutiste, son univers surchargé, coloré, pop et flamboyant. Mais derrière la lumière et le faste, se cache des blessures dont l‘ampleur est proportionnelle à la taille de ses œuvres et à ses expériences artistiques. Niki de Saint Phalle provoque pour dénoncer, renonce pour explorer, sacrifie pour rendre justice, détruit pour créer. Tout en elle est cri, chaos, révolte, tumulte, sous une apparence fragile et gracieuse. Elle lutte, contre les inégalités des chances, pour la place des femmes et la parité, pour les opprimés, contre l’enfermement, contre l’aliénation, contre la soumission, contre la mort, contre le racisme, contre les exclusions, contre l’ordre établi, la morale bafouée, la religion impuissante. Elle refuse l’hypocrisie, le mensonge, la cupidité. Idéaliste ? Utopiste ? #Charlie avant-gardiste ? Quoiqu’il en soit, sa colère sourde, elle l’extériorise. Ses peurs enfouies, elle les met à nu. Ses douleurs, elle en réalise des assemblages polychromes, dans lesquels elle juxtapose ses symboles, son propre système de repères. Niki de Saint Phalle : une conquérante, humaniste qui se bat contre une mère dévorante comme une araignée, un père incestueux, la maternité, le couple. Elle rêve, se raccroche à des mythes, des cultures spirituelles, ésotériques, animistes ; elle emprunte aux Mayas, aux planètes, aux peuples africains, à la culture égyptienne, à la société romaine, à l‘iconographie grecque, à la sagesse animale. Elle sculpte des monstres, tire au fusil sur des toiles ou des Autels, avec des œufs, elle fait danser de grosses Nanas qui représentent le monde, elle érige des tours à moitié détruites, des phallus démesurés. Par-delà, il y a le sida, les attaques terroristes… Elle vit pour, par et dans son art : elle invente des sculptures-maison. Ses constructions sont élaborées avec des miroirs et des harmonies de couleurs qui invitent à réfléchir sous divers angles : les miroirs de la connaissance. Bien sûr sa création est une allégorie de la femme enceinte. Elle se dit elle-même si « obsédée par la création, que je crois que je pourrais être toujours enceinte ». Ainsi, son unique sujet est la femme, victime de sa condition et héroïne d‘un monde à édifier. Femmes mariées, prostituées, sorcières, déesses, représentées avec cette accumulation d‘objets brutaux, guerriers, ou d‘animaux monstrueux, de dragons, allégories du pouvoir masculin. Car seule une femme peut utiliser avec poésie ces armes, et détourner le pouvoir maléfique des monstres grâce à son imagination féconde. La femme fertile, au cœur de toute créativité, au service de l’humanité et du bien. La quintessence de son œuvre est rassemblée dans son jardin des délices : ce tarot gigantesque, avec la papesse (naissance), le fou (débile en apparence, il symbolise la quête de soi), l’empereur (domination), parmi les 3 arcanes majeurs. Refuge ultime pour l’Artiste.

Niki de Saint Phalle, jusqu’au 2 février. www.grandpalais.fr

Tag(s) : #Expositions
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