Mardi 28 avril 2015.
Il y a un peu plus de cent ans…
Anne Hidalgo, maire de Paris, a inauguré officiellement l’exposition Arménie 1915 à l’Hôtel de Ville, devant un parterre d’Arméniens de la diaspora, d’Arménie, en présence d’une délégation d’officiels des sphères institutionnelle, publique, médiatique.
Anne Hidalgo a souligné vouloir faire de ce centenaire « un événement particulier » dans la capitale faisant écho à sa visite, pour la première fois, ce 24 avril 2015 sur le sol arménien, lors des commémorations du Génocide des Arméniens. Elle a tenu à souligner par ce déplacement que Paris s’affirmait résolument "aux côtés du peuple arménien, dans ce travail indispensable de reconnaissance de l’histoire et de sa vérité". Elle a revisité ce moment chargé d’émotions, vécu aux côtés de François Hollande, président de la République Française, même s’il ne s’agissait pas d’un moment fondateur, puisque la France se bat depuis longtemps contre la négation du génocide des Arméniens. Anne Hidalgo a également passé en revue les événements qui ont marqué ce centenaire : le recueillement devant la statue de Komitas, figure emblématique du génocide arménien, devenu le symbole des martyrs d’un peuple, à Paris. L’extinction de la Tour Eiffel et de tout scintillement. La ronde des femmes, initiée par l’association La Croix Bleue Arménienne depuis le 8 mars dernier, et l’opération 100 rosiers pour 100 ans d’extermination, plantés pour ces femmes qui n’auront pas pu voir grandir leurs enfants. « Il s’est produit un génocide il y a cent ans, nous ne pourrons pas l’oublier, car ce premier génocide du 20ème siècle a constitué celui qui a permis aux autres génocides de se perpétrer ; celui qui a préparé la Shoah ou l’extermination du peuple au Rwanda : nous ne pouvons pas l’oublier, et si nous ne nommons pas les choses par leur nom, nous nions ! ».
Précisons au passage, que le Mémorial de la Shoah consacre également une exposition au génocide arménien, en ce moment.
Anne Hidalgo a rappelé « le nécessaire travail de mémoire et d’histoire pour éviter que d’autres génocides ne se reproduisent, pour regarder la vérité en face ». Elle a célébré « les arméniens, notamment de Paris, qui « ont permis à la cité d’être ce qu’elle est », et « les arméniens, en général, à qui nous devons en partie la libération de Paris et de la France ». Elle a salué le travail des historiens, leur analyse, leur minutie, les mises à jour régulières effectuées grâce au concours de témoignages toujours plus nombreux, de nouvelles archives identifiées, avant de rappeler "la fierté pour Paris d’accueillir cette exposition pédagogique et civique, dédiée en particulier aux enfants « qui doivent savoir, eux qui portent le flambeau de la mémoire »".
Anne Hidalgo a remis la médaille de la Ville de Paris à Mourad Papazian et Aza Toranian, co-présidents du Conseil de Coordination des Organisations Arméniennes de France, ainsi qu’à Edward Nalbandian, ministre des affaires étrangères d’Arménie : « Vous êtes là, et portez la vie que les bourreaux ont voulu vous arracher ! Ils n’ont pas gagné. Vous avez gagné ! Vous êtes là, votre histoire est universelle ! Cette médaille représente le symbole des libertés et des révolutions, porteuse de savoir et de vie, des valeurs de la République, et de celles qui unissent la France et l’Arménie ».
Mourad Papazian a ensuite pris le relais : « Nous ne cessons de marteler ensemble cent ans, cent ans de deuil et de combat ; Aujourd’hui nous affirmons notre détermination à poursuivre ce combat jusqu’au bout, car il s’agit d’une cause juste ; Car nous en avons fait le serment auprès des 1,5 million de victimes, nous qui sommes issus de la 2ème, de la 3ème génération !» (…), « Le gouvernement turc doit savoir que nous irons jusqu’au bout, que nous ne lâcherons jamais ! Nous poursuivrons la lutte pour la justice, pour l’humanité et pour le peuple turc, qui doit pouvoir vivre son avenir sans ce fardeau ! » (…), « C’est des élites de Turquie que nous attendons le sursaut, comme de la société civile, pour la remise en cause de la politique négationniste » (…), « Nous tenons à rendre un hommage à ceux qui, en Turquie, risquent leur vie au prix de la vérité, emprisonnés parce qu’ils défendent les droits de l’homme et l’égalité : ils ont besoin de notre soutien, des alertes efficaces des organisations des droits de l’homme ! » (…), « Les commémorations du Génocide Arménien à travers le monde ont affirmé la justice contre l’obscurantisme, la vérité contre le négationnisme, et cette exposition accueillie par Paris est une initiative durable, qui rappelle à quel point Paris, ville des lumières, est engagée au service de la justice ».
Ara Toranian a poursuivi : « Je pense à tous les Arméniens qui ont fait sortir de l’ombre ce génocide, et je rends un hommage particulier à Alexis Govciyan, qui a orchestré les événements commémoratifs de ce centenaire (…), de cette vague d’émotion constitutive de son identité, de ce qui a structuré ce peuple » (…), « Le peuple arménien n’est pas seul, l’isolement a été brisé en grande partie grâce à la déclaration courageuse du pape François malgré les pressions et enjeux diplomatiques, la tribune de Charles Aznavour du 18 avril, le concert du centenaire, d'autres événements, le déplacement du président de la République, François Hollande en Arménie le 24 avril, cet autre témoignage de Manuel Valls devant la statue de Komitas, l’engagement à leurs côtés d’Anne Hidalgo, la Tour Eiffel éteinte, cette exposition aujourd’hui : merci pour ces gestes, madame le maire » (…), « "Commémorer, c’est le propre de l’homme", a dit en substance le philosophe Alain, mais commémorer traduit un acte profond pour la vérité, la justice, la paix. Un acte qui favorise les conditions d’un dialogue pacifié avec la Turquie. Un acte qui a attiré l’attention mondiale » (…) « Peu de choses ont changé depuis cent ans, mais des signaux internationaux ont été envoyés ; Cette exposition constitue une contribution pérenne sérieuse à la paix, lieu de mémoire et de fabrication de l’histoire ».
Le directeur du Musée-Institut arménien du génocide, Hayk Demoyan, a salué « ce jour historique, et l’honneur qui avait été fait de présenter les collections du Musée-Institut à la France, pays fraternel, dont certaines pièces, exposées pour la première fois, sont un témoin silencieux du génocide des Arméniens, du plus grand drame du 20ème siècle. Des pièces qui portent l’histoire et la mémoire d’un peuple ». Il a offert à Anne Hidalgo le dessin original de l’affiche de l’exposition, de W.B. King, collecte de fonds du NER, au profit des réfugiés arméniens.
Enfin, le ministre des affaires étrangères arménien, Edward Nalbandian a conclu : « En 2015, pour la première fois depuis cent ans, l’humanité commémore un génocide : un crime contre elle-même, cent ans de déroute et d’errance, cent ans d’une existence déshumanisée. Un crime qui signifie : exterminer l’autre parce qu’il est différent. Ces cérémonies témoignent de la solidarité envers ce peuple, qui a survécu » (…) « Si le génocide avait été reconnu, les nazis auraient-ils agi en toute impunité ? Non. La communauté internationale a –t-elle prit les mesures nécessaires pour éviter ces actes génocidaires ? Non. (…) L’humanité va –t-elle se réveiller, enfin ? Telle est la question que pose ce centenaire ; Grâce aux paroles du pape François, aux actes du parlement européen, du conseil de l’Europe, du secrétariat général de la francophonie… ; Grâce aux résolutions adoptées en Allemagne, en Autriche… ; Grâce aux déplacements en Arménie, notamment à Erevan de délégations, dont la France, fidèle à son rayonnement international en matière de droits de l’homme » (…), « La France a rendu hommage au niveau le plus haut de l’Etat. Merci à Anne Hidalgo d’avoir été dans cette délégation (…), et de revenir en octobre pour poursuivre la logique de partenariats initiée entre nos deux capitales ».
Soulignons que l’inauguration d’un centre de mémoire et de civilisation à Paris a été évoqué : une si belle manière d’achever #Arménie2015.
Pour mémoire : Part1