50 ans de sauvegarde, depuis la loi Malraux au musée Carnavalet
Le Marais a été le premier secteur sauvegardé grâce à la loi Malraux, alors ministre des affaires Culturelles. L’intention a d’abord fait l’objet d’une intervention à l’Assemblée Nationale (23 juillet 1962), dont le musée propose cet extrait : « Sur la plupart de ces quais au-delà de Notre-Dame ne figure aucun monument illustre (…). Ils sont les décors privilégiés d’un rêve que Paris dispensera au monde, et nous voulons protéger ces décors à l’égal de nos monuments ». La loi pour la sauvegarde du patrimoine historique a ensuite été promulguée le 4 août 1962 : « conservation, restauration et mise en valeur », et à Paris, ce quartier du Marais a inauguré cette forme de protection particulière, sur un périmètre délimité le 16 avril 1965. D’autres cœurs de villes lui ont succédé, à Lyon, Chartres, Clermont-Ferrand, Aix-en-Provence par exemple.
Le Marais représente 126 hectares, soit 1,2% de la surface de Paris, et comprend les 3ème et 4ème arrondissements, qui accueillent chacun 35.000 habitants ; 130.000 personnes y travaillent et 20 à 30 millions de touristes y transitent. Aujourd’hui le Marais est réputé pour ses hôtels particuliers dont les plus anciens datent du XVIè siècle (parquets, portes, fenêtres, linteaux exposés, de donateurs ou retrouvés grâce à des fouilles –puisque secteur protégé, aucune modification de bâtiments n’est possible), et ses structures architecturales contemporaines (maquettes de la société des Cendres par Pierre Audat, de la fondation des Galeries Lafayettes et sa tour de verre centrale par Rem Koolhaas), ou les logements sociaux réalisés par le bailleur Elogie, partenaire de l’exposition (maquette des 600 logements sociaux, construits par Chartier-Corbasson, dans le respect du cahier des charges imposé par la loi de sauvegarde).
L’exposition se déroule par étapes. Après un extrait de film (destins croisés contrariés des capitales Paris et Berlin, de Frédéric Wilner, à partir de samedi sur Arte), et le un rappel contextuel, l’on découvre les cartes et les témoignages des habitants du Marais, notamment à travers une borne interactive réalisée avec le concours d’étudiants des universités Paris I – Panthéon Sorbonne et UPEC Val de Marne, Institut d’urbanisme de Paris, et Paris 8 Vincennes Saint Denis. Deux rues emblématiques de chaque arrondissement ont été retenues : la rue des Rosiers (4ème) et la rue du Temple (3ème). Ainsi démarre l’appréhension de la transformation urbaine de ce quartier.
Deux salles sont consacrées aux fouilles, dons, fragments, lambris, reconstitutions d’Hôtels particuliers : Saint-Aignan, Domont, Beauvais, et à l’approche sensorielle et chromatique du Marais, par exemple à travers le nuanciel de Guillaume de Monfreid, qui a proposé une déclinaison de la couleur originelle « pierre », affirmant qu’il existait autant de couleurs que de pierres composant le Marais, sur lesquelles le ciel se reflétait. Les nouveaux matériaux sont présentés, incorporés aux façades d’époque, comme le zinc ou des structures métalliques, offrant aujourd’hui à ce quartier une palette de « couleurs relatives », ou « couleurs minérales vives », qui tranche avec sa noirceur d’avant 1950.
Un îlot de photos est consacré à … l’îlot 16, au sud du Marais, réputé insalubre, où beaucoup mourraient de tuberculose et priaient leur protecteur, Saint Gervais (vitraux). Sa réhabilitation a fait l’objet de plusieurs techniques, notamment la démolition et le curetage.
Une approche politique fait suite, mettant à l’honneur les acteurs majeurs de cette loi et de la sauvegarde du Marais : André Malraux, et Pierre Sudreau, ministre de la Construction, et leur farouche volonté de ravaler des monuments parisiens emblématiques pour les considérer dans leur contexte. La salle « Malraux » est composée, grâce au concours de l’INA et des archives nationales, de photos d’époques (caractère aéré du Marais, composé de jardins japonais), documents d’archives, traités signés, images, extraits de la loi, plans et tracés successifs, équipes projets, architectes, et de quelques verbatims du discours de Malraux, qui jalonnent aussi le catalogue.
L’institutionnel fait place à un « musée de vie », qui permet d’articler les points de vue : associations (Paris Historique), festivals (Festival du Marais), programmes, affiches, enseignes, concours de photos (FNAC), regroupements et initiatives de particuliers, fondations (Maeght). Cette partie ne fait pas l’impasse sur les polémiques entre opposants et défenseurs de la réhabilitation du Marais, largement filmée par la télévision japonaise, ces rébellions faisant écho aux problématiques auxquelles la ville historique de Kyoto se voyait confrontée. L’un des sujets majeurs est mis en lumière dans une alcôve : la place réservée aux piétons. Plans, tracés, et photographies, notamment de Marianne Ström et d’un endroit significatif : le marché des enfants rouges, ancien hospice pour enfants abandonnés sous François 1er, qui portaient une tunique rouge, devenu ce lieu éclectique et effervescent.
L’exposition s’achève par un mur de dessins réalisés par l’association Urban Sketchers, et d’un manifeste. Prendre le temps de regarder le Marais en butinant, en observant, en se posant, en soufflant. La meilleure manière de porter un regard distancié sur la réhabilitation d’un quartier historique et patrimonial.
Le bailleur social Elogie proposera aux habitants des logements sociaux du Marais des promenades du quartier, une visite de l’exposition, afin qu’ils mettent en perspective leur propre parcours résidentiel.
Au Musée Carnavalet, Histoire de Paris
Retrouvez mon Live @i_kevorkian du vernissage, le 3 novembre
Mon roman « Les Enfants Rouges » (Jérôme Do. Bentzinger, 2013), en référence au marché éponyme, qui vient de célébrer ses 400 ans, se situe en majeure partie dans le quartier du Marais, initialement quartier d’artisanat (bijoutiers, fourreurs). Ce roman construit autour d’un fait de société, comme les autres et en particulier mon dernier : « Amertume » (Editions du Net, 2015) qui répond aux « Colères » de Lionel Duroy (Julliard, 2011), feront l’objet de dédicaces
Samedi 7 novembre : Epicerie-fine-cave-à-vins-restaurant Paris XVII, 41 rue Guersant, 17ème
Samedi 28 et dimanche 29 novembre à la braderie arménienne Chêne France, Collège Samuel Moorat à Sèvres.