« Et sa voix d’or proféra :
-Je pars.
-Tuvazou ? demandai-je.
-Plaît-il ?
-Ou, si tu préfères, tuparpourou (bien que tuparpourou me semble aussi laid que tuvazou).
-Je ne sais, Nicole, un conseil.
-Je ne m’appelle pas Nicole.
-Je ne le sais que trop. Alors, ce conseil…
-Vatanza Saint-Tropez ».
C’est Robert Rey* qui invite. Allonzy donc sanzéziter !
Puis ‘La voix de Colette’* indique : « Aucune route ne traverse Saint-Tropez. Une seule vous y mène et ne va pas plus loin. Si vous voulez repartir, il vous faut rebrousser chemin. Mais voudrez-vous repartir ? ».
Car, comme le rappelle Madeleine Merceron* : « La position de Saint-Tropez sur la Méditerranée, la profondeur de son golfe en faisait un refuge comparable à ceux de Toulon et de Villefranche. Saint-Tropez était devenu une cité de corsaires ».
Et contre ‘Vents et Marées’ distingués avec précision par Jean Despas* : le Mistral (Nord-Ouest), la Tramontane (Nord), le Gregali, l’été qui apparaît lorsque le Ponant se couche (Nord-Est / Ouest), le Levant (est), la Céruse (Sud-Est), le Sirocco (Sud), le Labe (Sud-Ouest), vous y demeurerez une fois installés, à Saint-Tropez.
Saint-Tropez, c’est un mythe. Une citadelle (1583) et un cimetière, un port de pêche : La Ponche, des ruelles serpentines, une place (Les Lices), une gendarmerie (cinématographique), une chapelle (Saint-Anne), un repaire d’artistes, des yachts (démesurés), des shorts et du vichy (micros), une foule de pieds (nus), des plages de roseaux, le club 55, des snobismes et autres mondanités, le Sénéquier et l’Oustalou, des tilleuls des cèdres des cyprès des mûriers des platanes, c’est Jean Lauer* et ses tapis d’Orient fabriqués par la main-d’œuvre Arménienne chassée de Turquie, c’est aussi la mode « à la manière de » : Brigitte Bardot, Françoise Sagan et Jack Nicholson et en images, tout cela est formidablement immortalisé par Willy Rizzo et c’est en ce moment-même exposé dans la galerie éponyme, rue de Verneuil. « La belle histoire », c’est un air suave et indolent, un air de liberté qui aurait pu être chanté par Benjamin Biolay, ça rappelle « La Superbe ».
Willy Rizzo commence à la raconter, cette histoire-là, dans les années 1940, au creux du village de pêcheurs. Le calme et l’artisanat. Et tout s’accélère : les parisiens en villégiature, BB, la femme qui y est créée, Vadim, Trintignant, et les fêtes s’y improvisent, les stars s’y pressent, internationales, l’ambiance Nouvelle Vague des années 1950 fait fureur. On y danse sur les toits ou dans les criques, on y afflue en décapotable ou en Vespa, on y danse à s’y étourdir, le jour se confond avec la nuit.
Willy Rizzo y était et il a tout vu : 35 de ses clichés ont été sélectionnés, tirages argentiques en noir et blanc ou en couleurs, éditions signées et numérotée, limitées à 8 exemplaires. Accrochés dans un espace à l’atmosphère seventies réjouissante, avec en sous-sol, la salle de projection personnelle qui diffuse des extraits de films tournés à St Trop’ ! Bien sûr il en manque, mais en contrepartie, on découvre des inédits surprenants et savoureux. Un dé-lices, une bulle d’air, une soupape d’oxygène, sans tabou.
Comment ne pas terminer par cette légende extraordinaire, racontée par Jean Lauer* qui s’exprime depuis Cogolin : « Nous savons n’être que des ‘ploufs’, nous autres de l’arrière-pays, vis-à-vis de la Cité Reine du Golfe. Il faut cependant nous accorder quelques titres de noblesse puisque le coq tenant un brin de lin en son bec (coq au lin) s’envola sur la barque du saint et vint se poser sur notre colline pour lui donner son nom, pendant que le chien ou Grimaud se réfugiait plus loin du château ». Cependant, connaît-on jamais Saint-Tropez ?
Studio Willy Rizzo – 12 rue de Verneuil, Paris. www.willyrizzo.com ; Jusqu’au 25 juillet.
* Relire "Saint-Tropez, le mal connu" aux éditions Julliard, décrit par un collectif, complété de 5 eaux-fortes de Dunoyer de Segonzac
Do you or not ? Saint-Tropez la belle histoire