La Callas, derrière la diva, la femme
Azad Magazine par cet article a souhaité faire redécouvrir à nos lecteurs cette diva.
Gala de la Légion d'Honneur, Paris 1958.
© Fonds-de-Dotation-Maria-Callas
La Callas n’a cessé de travailler avec exigence, fuyant la médiocrité, et de s’affirmer dans un art pour lequel elle était prédestinée, sacrifiant sa vie de femme : « Je ne suis que l’humble servante du génie créateur », reprenant cet air d’Adriana Lecouvreur, un opéra de Francisco Cilea sur un livret d’Arturo Colautti. Quarante ans après le décès de la diva après trois dernières années de solitude dans son appartement feutré et clos de la rue Georges Mandel à Paris, Tom Volf donne la parole à Maria et fait revivre la femme que La Callas n’a cessé de remiser : « Il y a deux choses liées, mais distinctes : Maria et La Callas ». En 2013, Tom Volf étudie la médecine à New York. Il découvre la voix de La Callas lors d’une soirée. Il suffit d’un enregistrement. Il est envoûté et conduit une enquête fiévreuse, à son insu ou peut-être davantage « appelé », une quête qui va lui ouvrir des portes jusqu’alors inexplorées et favoriser des rencontres inespérées, notamment avec George Prêtre ou encore l’attachée de presse de Pasolini et Zefirelli et, surtout, le majordome et la femme de chambre de la soprano, qui n’ont jamais abandonné Maria Callas.
C’est une histoire de destin qui s’impose et face auquel il est vain de lutter
Cinq ans plus tard et après un tour du monde singulier, tout entier dévolu à Maria Callas, destins désormais mêlés, il propose une déclinaison extraordinaire de Maria by Callas. Une vie de femme hors norme, adulée tout autant qu’outragée. Melpomène atemporelle. Tragédienne plus imposante que n’importe quelle héroïne grecque. Cela commence par une exposition qui a inauguré la Seine Musicale, nouvelle scène à l’Ouest de Paris, puis trois ouvrages et un film suivent. Un ensemble homogène et complémentaire d’écrits, d’écrans, de documents sonores et vocaux exclusifs, de photographies personnelles, d’extraits de répétitions, de coupures de presse. Autant de pièces intimes, jamais dévoilées ; autant de sentiments et de coulisses de la vie d’une femme, autant de trahisons, de fake news, de selfies ; autant de morceaux du puzzle d’un bonheur simple que Maria ne parvenait pas à toucher : « Je suis un être libre qui voudrait croire aux jolies choses de la vie », sauf que « Vivre, c’est souffrir » déclarait-elle le 15 février 1970 à The Observer.
Médée, La Scala 1957.
© Fonds-de-Dotation-Maria-Callas
C’est en Orient que tout converge dans la vie de Maria Callas.
En Grèce ou en Turquie, terres originelles. Née Kalogeropoulos, elle porte quatre prénoms éloquents : Maria (prophétesse de Moïse : Myriam, la vocalisation araméenne Mariam a donné le grec Maria), Anna (mère de Marie et grand-mère de Jésus-Christ, sainte trinitaire qui se voit construire une église à Constantinople en 550), Sophia (Sainte Sophie a donné son nom à la basilique chrétienne de Constantinople, consacrée à la sagesse de Dieu) Cécilia (sainte patronne des musiciens). Des débuts à Athènes dans Fidelio, l’unique opéra de Beethoven. L’incarnation de Médée, l’une de ses figures tutélaires créées par Euripide, célèbre poète grec. Médée commet le crime le plus effroyable, le scelus nefas : un double infanticide pour soustraire ses enfants à un époux qui a rompu le pacte du mariage, après avoir vécu le dolor et le furor : la lente déshumanisation d’une épouse bafouée. Le seul personnage qu’elle incarnera au cinéma, une interprétation barbare, pour son cher Pier Paolo Pasolini ; film pendant lequel elle commencera à perdre sa voix, quittée par son époux, Onassis.
Avec Marilyn Monroe à l’anniversaire de JFK 1962.
© Fonds de Dotation Maria Callas
La Grèce, encore, qui a réuni ces amants volcaniques sur une île : Skorpios. Une île que l’armateur grec, heurté à jamais par « le grand massacre » et la fuite de Smyrne par les troupes de Mustafa Kemal, avait offerte à la diva et sur laquelle, cependant, il épousera Jackie Kennedy. La Grèce toujours, où Maria s’offre des vacances avec Pasolini à Tragonissi.
En vacances avec Pasolini.
© Fonds de Dotation Maria Callas
La Grèce enfin, en 1976, dernier été d’une harmonie qu’elle n’aura pas réussi à atteindre, même à Halkidiki, entre amis, avant de mourir un an plus tard, seule : « Plus qu’une femme de succès, j’aurais voulu être une mère, avoir des enfants ». C’est peut-être cela que lui a offert Tom Volf : une nouvelle génération d’enfants pour « la Divine », qui concluait : « Je suis Maria Callas. Et je ne suis qu’une femme ». Personne n’avait su répondre à la tendresse de cette Dalila. Tom Volf a essayé et a réussi, là où tous les autres ont échoué. »
Callas Confidentiel, un beau livre-événement de Tom Volf.
260x285, 240 pages, 45 euros.
Tom Volf a notamment dirigé la communication digitale et audiovisuelle
du Théâtre du Châtelet à Paris.
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