La Fédération Sportive et Culturelle de France vient de célébrer ses 120 ans. Son président Christian Babonneau évoque « une institution historiquement originale » dont l’ambition est de « révéler la passion qui vous anime » ; « une institution au service de l’épanouissement de la personne et du raffermissement du lien social dans notre société », grâce à la pratique culturelle et sportive.
Le samedi 23 juin, pour exalter et partager cette singularité, l’institution organisait un concert extraordinaire, dans l’un des endroits les plus emblématiques de la capitale : La Madeleine. Construite en près de 90 ans, entourée de 52 colonnes, longue de près de 110 mètres, d’une hauteur de 30 mètres, son architecture néoclas- sique est tout entière dévolue « Au Dieu tout puissant et très grand, sous l’invocation de Sainte Marie-Madeleine. »
Sainte Madeleine est une figure du christianisme, dont l’origine araméenne Magdal, symbolise foi et ortho- doxie. Quel autre endroit pouvait mieux accueillir Mozart et ses œuvres religieuses de fin de vie ? Écouter son Requiem constitue toujours une aventure bouleversante. L’Ensemble Appassionato fondé par Mathieu Herzog, accompagné de 160 choristes amateurs, venus de France, Belgique, Allemagne, Espagne, qui la veille ne se connaissaient pas, et de 4 solistes professionnels, sous la direction du chef Damien Sorraing, l’ont prouvé.
Le Requiem... texte liturgique par excellence : une œuvre de plénitude et de révélation que les solistes ont trans- cendé. Elsa Roux, alto, ex-championne et vice-championne du monde de hockey sur patins à roulettes (Brésil, 2012 ; France, 2014) ; Christophe Berry, ténor ; Frédéric Caton, basse et Naïra Abrahamyan, soprano, ont magnifié la vertu existentielle, soulignant les mots du président « La musique donne de l’âme à nos cœurs et des ailes à nos pensées. »
Naïra Abrahamyan est née à Érevan, d’un père chanteur à l’Opéra et d’une mère pharmacienne. Des parents qui ont soutenu et encouragé leurs deux filles dans la pratique du chant et de la musique. Diplômée de chant et de piano, Naïra Abrahamyan a débuté à l’âge de 7 ans à l’École de Musique de la capitale arménienne, avant d’intégrer le Conservatoire Supérieur d’État Komitas. Elle est ensuite partie à New-York se perfectionner à la Julliard School. En parallèle, elle débutait une carrière de soliste permanent à l’Opéra de Erevan. « Soprano, c’est une vie difficile », explique l’artiste aux multiples récompenses presti- gieuses, poursuivant : « Mon père nous avait mises en garde, ma sœur, également mezzo-soprano qui a adopté une carrière internationale, et moi ; Il avait raison : ce métier implique un engagement total, de nombreux dépla- cements, des heures de répétition et c’est souvent au détriment d’une vie de famille équilibrée et stable. Lorsque j’ai eu mon fils, j’ai pris conscience de la nécessité de freiner ma carrière (...) ; Je n’ai pas d’agent, ce métier fonctionne beaucoup par le bouche-à-oreille. C’est ce qui s’est passé pour le concert de la Madeleine. »
Comment a-t-elle vécu ce moment ? « On a répété une seule fois, tous ensemble, à la générale, personne ne se connaissait mais ça a suffit ; La symbiose était immédiate, pourtant les choristes et les musiciens, provenaient de partout en Europe, arrivés la veille. La Madeleine ? j’y entrais pour la première fois de ma vie, j’étais impres- sionnée, c’est une église que je voulais visiter depuis longtemps. Chanter le Requiem de Mozart dans ce lieu est incroyable, surtout pour une arménienne croyante ! Je l’ai chanté comme une prière, parce que Le Requiem est d’abord une prière et j’étais en communion. Je chante tous les dimanches à l’église du Prado à Marseille, où je réside et pour moi, ce contact avec Dieu est nécessaire. Je chante la messe arménienne écrite par Komitas (...) Interpréter le Requiem, c’est un peu comme être Tosca, Carmen, Violetta... C’est un rôle, je sers un personnage ou une prière. J’ai chanté Verdi, Puccini, Bellini, Händel, Vivaldi, Malher, Beethoven, Aprikian, Tigranian en Italie, en Chine, aux États-Unis, en Turquie, c’est toujours la même émotion et le travail est identique même si l’intention change (...) J’ai hésité à me rendre en Turquie, j’avais peur de ce que j’avais entendu dire ; Or, j’ai reçu un accueil chaleureux à Ankara. Dans un village plus reculé néanmoins, les organisateurs ne pouvaient assurer ma sécurité et le concert a été annulé. »
Naïra Abrahamyan enseigne aussi la pratique du chant et du piano à Bouc-Bel-Air. Son actualité sera marquée par un concert en novembre, en tant que soliste, avec la chorale Sipan Komitas, une formation dépositaire des œuvres de Komitas, dirigée par Garbis Aprikian, directeur artistique et Haïg Sarkissian, chef de chœur.
Quant à la chorale et aux musiciens de la Fédération Sportive et Culturelle de France, une proposition étonnante leur a été adressée par le producteur et directeur artis- tique de l’émission « Prodiges » (France 2). Présent à La Madeleine et conquis par la prestation « d’une rare excel- lence française », il leur a donné rendez-vous le 28 octobre à l’Opéra Garnier, de 11h à 19h. Au programme de cette journée inattendue : des extraits de L’Ave Verum et du Requiem de Mozart notamment.