Mon parfait inconnu, drame de Johanna Pyykkö avec Camilla Godø Krohn, Radoslav Vladimirov (1h47)
J’aime les histoires amorales et « Mon parfait inconnu » m’a plu. Il m’a attendrie aussi. Premier film plutôt sophistiqué et inattendu dans sa mise en scène, qui oscille entre ce que la protagoniste aimerait faire et dire, dans sa tête, et ce qu’elle fait et dit, dans la vraie vie ; ce qu’elle imagine et ce qui existe, entre images qui grésillent, floues et entremêlées comme dans un kaléidoscope, et celles bien réelles, fades. Ebba est impulsive, parano ; elle vit sa vie avec des filtres.
Femme de ménage dans les bâtiments du port d’Oslo, elle n’hésite pas à voler ou à traîner la patte. Cahin-caha, sa responsable lui accorde sa confiance. Elle a arrêté le lycée, est logée au sous-sol d’une maison bourgeoise, à la vue imprenable par-delà le port. Elle s’occupe de sa demi-sœur trisomique qui semble avoir une vie plus exaltante que la sienne : elle est amoureuse. Le point faible d’Ebba.
Un soir sur le port, elle croise le chemin d’un homme amnésique et mal en point. Elle appelle les secours avant de se raviser : elle le ramène chez elle. Organise en deux temps trois mouvements une vie de couple, dans la maison Art & Décoration, que ses occupants ont proposé à Ebba de garder pour l’été. Elle pêche par vanité avec une telle insouciance et une telle crédibilité que l’homme, comme le spectateur se laissent prendre au jeu. Ebba est attachante, plus mutine que menteuse. Elle a tout juste atteint la phase de disgrâce adolescente et manque d’estime de soi : est-ce que son stratagème va lui permettre de se trouver ? J'avais tellement envie d’y croire. À chaque instant, elle risque son va-tout avec une fraîcheur incandescente : au fond, triche-t-elle tant que cela ? Est-elle si coupable ?
Je pense que Oui : Ebba va accéder à la rédemption, mais à quel prix. Celui d’un effroyable manque de confiance en elle. À bien y réfléchir, passer à côté de l’homme de sa vie, n’est-ce pas un bien pour un mal ?