Leurs enfants après eux, drame, des frères Boukherma (2h21)
Adapté du roman éponyme de Nicolas Mathieu (Actes Sud, prix Goncourt 2018)
Un film interminable. Quand on en est arrivés à l'année 1998, même pas en finale de la Coupe du monde de football, je me suis dit : P'tain, j'espère qu'on n'va pas changer de siècle. J'avais l'impression d'être assise dans mon fauteuil de cinéma depuis 15 jours, une éternité, tout' engourdie, ça n'en finissait pas. Le monde s'était peut-être écroulé, la société avait un nouveau gouvernement après la démission de celui de Michel Barnier suite à la motion de censure, la tempête Darragh avait changé de continent et n'était plus qu'un hashtag évanescent.
Le film est une somme de clichés ringards et éculés, mêlée à beaucoup de pathos et trop d'arrêts sur images.
Paul Kircher que j'adore: donnez-lui des rôles d'envergure, à sa mesure ! On sait qu'il est un grand acteur: laissez-lui la chance de le prouver et de s'installer sans le cantonner.
Ludivine Sagnier, si prometteuse hier, offrez-lui des rôles flamboyants aujourd'hui !
J'espère que leurs personnages ne leur survivront pas après eux.
Gilles Lellouche tire son épingle du jeu: sans concession, brut et sincère. Il appuie là où ça fait mal. Épatant.
Mention spéciale à Sayyid El Alami, qui émerge, sans avoir besoin de parler. Son regard, son allure suffisent: une vraie révélation. Je ne suis pas sûre que le fait que son personnage fut Arabe soit une marque de grande objectivité. Pour avoir dans les années 90 fréquenté pas mal d'Arabes de cités, c'étaient souvent les plus élégants, peut-être même les plus fréquentables, les plus beaux parleurs, vifs et drôles. Pas tellement ceux dont il aurait fallu se méfier. Mais peut-être que dans le Grand Est, c'était différent. Même si, à l'époque, fin du XXe s. #touchepasamonpote commençait à avoir moins de portée, il rassemblait encore les uns et les autres.
Quant au contexte de misère sociale d'une région sinistrée, je regrette, mais il est survolé, et sert vaguement et inutilement de prétexte. Cette histoire -ou plutôt, ces histoires dans l'histoire, ce qui rend trop complexe et foisonnante l'intrigue- aurait pu prendre se dérouler n'importe où en vérité. Elle aurait pu prendre comme prétexte pas mal d'autres formes de ressentiments. Tout simplement: la bourgeoisie versus le prolétariat (qui est aussi, l'un des sujets). Ce film manque d'avoir choisi un parti-pris unique, une ligne directrice et une seule.
Je n'ai pas lu le livre que je ne lirai pas, mais le film me donne l'impression d'être passé à côté d'un Goncourt. Ou est-ce le Goncourt qui a fait preuve de surestimation ?