5 Septembre, drame de Tim Fehlbaum (1h35)
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JO de Munich. 1972. La dernière fois en Allemagne, c’était en 1936, en pleine propagande nazie. Le 5 septembre, 8 membres du groupe terroriste palestinien Septembre Noir prend en otage 11 athlètes israéliens. Une seule équipe, présente dans le Village olympique pour couvrir les jeux à la télévision, est équipée pour suivre l’événement en direct à la télévision : elle représente la chaîne ABC. Les journalistes du pôle de l’information politique revendiquent de commenter le direct mais l’équipe des sports, sur place, refuse et s’engage. Quitte ou double. Ils disposent des caméras sur tous les « spots » et cernent la scène de la prise d’otage. Ils nous embarquent à l’intérieur, cellule de crise en régie. Geoff Mason (le vrai Geoff Mason deviendra producteur de télé), journaliste, prend les rênes opérationnelles : c’est son premier jour pour ABC. Il peut compter sur la disponibilité de la jeune Marianne Gebhardt, qui assure les traductions et sur la réactivité indiscutable de Jacques Lesgards et Carter Jeffrey. La première est Allemande, le deuxième est Arabe : l’affect s’immisce à mesure que les journalistes constatent les défaillances de l’organisation allemande, dans un pays qui n’a pas cicatrisé ses traumatismes. Geoff est supervisé par Roone Arledge, producteur, et Marvin Bader, chef des opérations. Le premier se soucie des audiences et de l’émotion auquel le second oppose éthique et morale journalistiques.
« Le point de vue n’est pas politique, il est émotionnel » affirme Roone. C’est parti : journalisme versus « terrorisme de l’utopie » tel que le qualifiait Jean Cau dans les années 80. On Air.
Ce film est d'autant plus réussi que l'issue de cette prise d'otages est connue de tous. C'est un fait historique. Contexte pour aborder le sujet de l’information en temps réel et ses limites, sans iPhone, sans téléphone portable, sans réseaux sociaux et en situation de monopole. Quelle visibilité accorder et à qui s’adresser, jusqu’où aller sans tomber dans le scoop publicitaire, comment évaluer et recouper ses sources dans la précipitation et le chaos, qui cibler des preneurs d’otages et des victimes, quel vocabulaire le plus juste employer, comment avoir en permanence une longueur d’avance, comment fédérer les équipes et s’assurer de leur honnêteté intellectuelle, comment garder son sang-froid, quelles concessions accorder aux autres médias tels que NBC.
Le film met en évidence les 5 principes de base, dans une situation d’urgence, menaçante : proactivité et rapidité pour ne pas laisser les choses pourrir et s’amplifier. Assumer et vérifier la cohérence des propos et des gestes. Agir de façon continue, sans temps mort, sans silence ni rupture. Donner de l’information, à fréquence régulière. Parler d’une seule voix et coordonner les prises de parole. Faire preuve d’humilité et d’humanité. Ceux qu’applique Geoff Mason, avec virtuosité, ingéniosité et conviction. Il nous colle des sueurs froides pendant 1h30. Poussée d’adrénaline maîtrisée par des acteurs et une réalisation impeccables.
Au final, 900 millions de téléspectateurs ont suivi le direct. Les onze otages et un policier ouest-allemand sont morts, ainsi que cinq preneurs d’otage, les trois autres ont été arrêtés.