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Expo : Au bout du rouleau

 

L’épopée du livre de Jack Kerouac de l’écrit à l’écran, en passant par le musée.

 

A l’occasion de la sortie du film de Walter Salles « Sur la route », inspiré du livre éponyme de Jack Kerouac, le Musée des Lettres et des Manuscrits, en partenariat avec MK2, expose à Paris le rouleau original. 36,5 mètres de papier conçu comme une bobine de film ou comme une route infinie, sur lesquels se dévident 125 000 mots écrits en 20 jours. Kerouac a 29 ans. Son tapuscrit sera édité dans une version expurgée en 1957 par Viking puis Gallimard, 10 ans après ses premiers carnets de notes devenus ce paragraphe unique de 370 pages. Aucune ponctuation, aucun paragraphe, aucune altération. Pas de point final non plus, une fin de rouleau dépecée. Selon Kerouac, un chien aurait « mâchonné le bout de texte ». Des mots surgis d’une fièvre, comme celle qui saisit le héros, Sal Paradise, à la fin de son voyage initiatique aux Etats-Unis, commencé après la mort de son père et sa rencontre avec Dean Moriartry, son inspirateur « adonis et baiseur », selon Allen Ginsberg.

Je défie quiconque d’avoir terminé ce récit autobiographique. De même, le film ennuie. Une fois le cocktail benzedrine, baise, biture intégrés, les errances déferlent en boucle pour réécrire l’Amérique. Un film sage, loin de l’explosion scripturale de Kerouac. Ce qui fascine, en revanche, c’est la découverte du cheminement qui conduit Kerouac à décrire les sensations brûlantes de ce voyage sous forme de rouleau. La manière dont il cannibalise ses amis d’épopée, en particulier Marylou. D’ailleurs, lorsque Marylou s’efface, le cocktail ingurgité devient carrément insipide. Marylou, plus que quiconque, incarne la folie, ce jet continu de vie qui inspirera la beat génération. Elle ne se censure jamais, elle jouit, elle symbolise « la forme sauvage, mec », « le vent d’Ouest (…) quelque chose de neuf … depuis longtemps attendu ».

L’exposition présente les influences qui ont sous-tendu la destinée de Kerouac avant qu’il ne devienne cet écrivain expérimental et hypnotique. Les poètes : Whitman, Rimbaud. Les surréalistes : Breton. Les écrivains qui se libèrent des règles : Proust, Céline. Et le jazz de Charlie Parker qui créé un rythme frénétique. Le rouleau exposé contient les scènes obscènes et les noms originaux des personnages : Neal Cassady, Allen Ginsberg, William Burroughs, Jack Kerouac, Louanne. Il renferme la dualité des personnages, en quête d’émotions, d’urgence et d’érotisation mais aussi d’une vie normale, familiale, bornée. Or, raison et sentiments sont incompatibles. Il explique qu’au bout de la route, il n’existe aucun trésor. Sauf l’éphémère.

 

Musée des Lettres et des Manuscrits, Exposition jusqu’au 19 août 2012, 222 bd Saint-Germain, 75007. www.museedeslettres.fr

Tag(s) : #Actualité
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