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Ciné : Des lendemains qui chantent de Nicolas Castro

Comédie (1h34), de Nicolas Castro, avec Pio Marmaï, Laetitia Casta, Gaspard Proust, Ramzi, Anne Brochet…

Pio Maimaï. Encore lui, pour notre plus grand bonheur. Frère, petit copain, amant, mari, fils, père : on veut tout de cet acteur. Il hésite et puis il sait. Il ne trahit pas, ni lui, ni sa famille, ni les spectateurs, ni la vraie vie, ni la comédie. Dans « Des lendemains qui chantent », premier film, il est question d’une politique de gauche en perte de repères (seule la gauche serait capable d’inspirer les films sur une mythologie qui se délite ? Je pense à « Doutes » de Yamini Lila Kumar, et cette association d’idée me permet d’entendre le couple Jeanne Cheral - Benjamin Biolay, décidément solide d’un point de vue musical, chanson française).Pio Marmaï vit l’effondrement des idées de la gauche au pouvoir, sur deux décennies. Pas n’importe lesquelles : les années 80 puis les 90’s. Point de départ pour le cinéaste Nicolas Castro, qui nous propose un débrief ingénieux et audacieux sur ces 20 années, composé d’archives habilement détournées et d’un regard acide mais juste sur les médias, la pub’, la com’ (les positionnements de Libération et du Nouvel Obs, jubilatoires). L’on fumait partout avec élégance et l’on achetait en francs, l’on roulait en 4L dans lesquelles on faisait l’amour, l’on pianotait sur minitel avant de passer à Internet, l’on se référait à quelques solides principes qu’il nous arrivait néanmoins de trahir, l’on lisait les classiques. L’on se réfugiait en famille ou entre amis. Il y avait des socles, qui parfois se révélaient défaillants mais qui demeuraient des repères. Nous doutions, bercés d’illusions qui nous permettaient d’accueillir des lendemains qui chantent. Nous osions, nous plantions, et recommencions. Nous dansions, aimions, buvions, et rien ne portait à conséquence. Nous tracions notre sillon dans la vie, hésitants et déterminés, lâches et fiers. Le temps des atermoiements faisait place aux certitudes, cela prenait 20 ans. Jusqu’à cette élection d’avril 2002, qui nous met face à un dilemme édifiant. Un casting de rêve sert ce scénario malin, drôle et sérieux, qui scrute avec beaucoup de recul et de justesse ces deux décennies. Pio Marmaï, donc, roc vertueux, inflexible, fidèle et loyal : il n’a aucun angle à arrondir pour éviter de se pervertir. Ramzi, dont l’insoupçonnable réussite sera proportionnelle à sa fulgurante déchéance, pionnier des sites télématiques. Gaspard Proust en publicitaire opportuniste, sans scrupule, sans foi ni loi, aux slogans redoutables (de Touche pas à Mon Pote à Génération Mitterand, ou La France pour tous…). Laetitia Casta confirme un talent d’actrice, si belle, si femme, en énarque qui s’échoue. Anne Brochet que l’on voit si peu, dont le talent pourtant lui permet d’incarner cette directrice de magazine worlwide, extravagante et futile, dont chaque mot prononcé est extrait d’une parole de chanson d’époque engagée et humanitaire : on n’a plus besoin ni d’avoir faim, ni d’avoir froid, l’Ethiopie meurt peu à peu. Un film frais et profond, paradoxal comme cette épopée d’une politique qui n’offre plus qu’amertume et colères.

Bande Originale, arrangée par Jeanne Cherhal pour "Des Lendemains qui chantent" de Nicolas Castro

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