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Expo : Des histoires dessinées d’ici et d’ailleurs, Musée de l'histoire et de l'immigration

Bande dessinée et immigration 1913-2013

Quatre années de travail, plus de 100 dessinateurs et scénaristes de BD, 500 documents et un thème qui n’avait encore jamais été exploré : L’histoire de l’immigration en bande dessinée. Le parcours est cadencé en trois temps. Peut-on y déceler la règle des trois unités, reflet de la dramaturgie qui sous-tend l’immigration ? Unité d’action : l’immigration est abordée au travers du parcours d’auteurs étrangers : Goscigny, Mac Manus, Bilal, Satrapi, Abouet, Boudjellal… Unité de temps : comment fabriquer une BD sur l’immigration ? La réponse est abordée à travers plusieurs prismes. Les genres (comix, fables, SF, western, bulles ou dessins seuls, BD reportage ou témoignage…), les influences (l’immigration Africaine s’interroge plutôt sur la cause du départ, tandis que d’autres auteurs se posent la question de l’intégration), les thématiques (place de la femme, rôle de la famille, homosexualité, présence des animaux -métaphores des « typologies » d’immigrés, héros -à l’instar de Superman, archétype de l’étranger venant d’une autre planète). Aurita, Abirached, Otto T., Morris, Giraud (Moebus), Mahmoudi… Unité de lieu : symboliser le voyage et les étapes des migrants, les raisons qui poussent une personne à s’exiler, le mythe du retour, la clandestinité, les papiers, la loi, le rôle de la police, l’intégration. Pratt, Mbumbo, Oiry, Viodé, Alagbé… Une question se pose : « Peut-on tout montrer » ? Quelle est la limite ? Les scènes de violence ou de mort au détriment de la morale, sont-elles audibles ? une mère qui jette son enfant par-dessus bord, espérant sa survie et sauver l’embarcation, est-ce tolérable ? Quelle est la bonne distance ? Shaun Tan conclue cette mise en scène incroyable, sans bulles. « Là où vont nos pères ». Seuls les visages sont dessinés. Avec tant d’intensité que l’on croirait de vieilles photos, conservées avec soin jusqu’au moment où la nécessité de savoir deviendrait impérieuse. Autant de destins, de traits, qui disent l’immigration. Ces visages, ce sont les nôtres, les vôtres, votre voisin et vous l’ignorez. Pour la première fois, cette exposition réunit des planches originales, inspirées de photographies de migrants, en transit à Ellis Island. En un dessin, une planche, les auteurs dénoncent et transmettent, assurent un devoir de mémoire, ne trahissent jamais leurs origines, et réussissent à se projeter. Une exposition nécessaire, qui marque les consciences, et qui est rattrapée par l’actualité, avec les migrants de Lampedusa, la marche des beurs ou l’affaire Léonarda. Comme si ce délai d’une trentaine d’années était celui, comme pour les archives, qui permettait enfin de s’approprier les choses, d’en faire des sujets-là grands publics. 1980, un précurseur : Farid Boudjellal et sa trilogie de l’Oud, ou la saga de Petit Polio dont le dernier tome, « Mémé d’Arménie » sort de l’ombre la grand-mère Arménienne d’un petit garçon né à Toulon, d’origine Algérienne. Une grand-mère rescapée, Arménienne, chrétienne. Des thèmes audacieux pour l’époque. Le premier à identifier un immigrant comme héraut d’une BD sur ce thème. Cet art-là, le 9ème, offrirait –il davantage d’espace d’expression sans attirer les foudres ?

Merci au commissaire Gilles Ollivier pour ses explications, sa disponibilité et ce travail, aux côtés de deux autres commissaires scientifiques.

Palais de la Porte Dorée, Musée de l’histoire et de l’immigration, Jusqu’au 27 avril 2014. www.histoire-immigration.fr

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